Remise de valises

Publié le par Balpe

Montpellier n'était pas encore une conurbation mexicaine impossible à traverser en voiture : la rue de l’Abbé Paul Paraguel est un chemin de campagne tranquille errant entre de rares villas ou propriétés plus ou moins clôturées, se terminant en impasse. Au fond du chemin, une propriété entourée de murs d’au moins deux mètres surmontés de tessons de bouteilles. Un portail de fer. A côté du portail, une sonnette. Natacha descend : « Viens… ». Marc la suit. Elle sonne, un judas grillagé s’ouvre dans la plaque de fer du portail, un œil s’y dessine. Natacha se met bien en évidence, elle dit : « La servitude de l’esclave se constitue dans son impuissance matérielle ». Le portail s’ouvre. Deux hommes, baraqués, marcel blanc et casquette bleu clair, style dockers, les accompagnent vers le perron d’une grande villa noyée sous de gigantesques platanes. Quelques marches, une terrasse, une entrée. Devant l’entrée, un autre mec, même style, même carrure. « Ça fait plutôt barbouzes… ou OAS si ce n’était pas démodé ! » se dit Marc tout en se gardant bien de la moindre réflexion. Ils entrent. Intérieur cossu, salon : canapé et fauteuil cuir marron foncé, murs bibliothèque, œuvres complètes de Lénine aux éditions de Moscou. On leur fait signe d’attendre. Il y a encore des coups à jouer : ils attendent.

Quelques minutes plus tard, un autre docker entre portant deux valises métalliques fermées de serrures de sécurité. Pas un mot n’est échangé : les choses sont claires maintenant, il risquait d'y avoir remise d'argent. Natacha prend une valise, Marc l’autre. Les dockers les raccompagnent jusqu’au portail qui se referme derrière eux.

Ils reprennent la route, retournent à Sète. Ils n’ont pas échangé plus de deux mots durant tout le trajet. Natacha se contente de dire : « Garder ces valises, quelqu’un viendra les chercher… un jour… Il s’appellera Eduardo Menezes ». Aucune date, aucune légende, aucun moyen d'identification, faudra faire avec…

Publié dans Natacha

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